1891 : Ravachol assassine l'ermite Jacques Brunel

L'histoire commence en 1891.

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Depuis plus d'un demi-siècle, un vieil ermite, connu sous le nom de frère Jacques Brunel appartenant à la congrégation des frères de la doctrine chrétienne, vivait dans l'antique monastère de Notre-Dame de Grâce.

Ce solitaire, âgé de quatre-vingt dix ans au moins, était connu de tout le monde à plusieurs lieues à la ronde. Revêtu d'une soutane presque aussi vieille que lui, il parcourait le canton de Saint-Rambert en demandant la charité. Plusieurs légendes, toutes plus bizarres les unes que les autres, s'étaient créées autour de sa personne. "Ses prières, disait-on, portaient bonheur; il excellait dans l'art de guérir les bestiaux, et le ciel l'avait comblé de ses dons! "

Le dimanche 21 juin 1891, vers midi, des touristes qui avaient l'intention de faire une visite à Notre-Dame-de-Grâce trouvèrent l'anachorète assassiné. Les meubles qui garnissaient sa maison avaient été bouleversés de fond en comble et mis littéralement au pillage. On acquit aussitôt la certitude que les assassins n'avaient eu que le vol pour mobile. Le frère Brunel, qui vivait d'aumônes et avait la réputation d'être très malheureux, n'était pas sans fortune. En effet, on a trouvé dans son domicile plusieurs pots de terre, des casseroles remplies de monnaie d'argent et un grand sac pesant 100 kilos contenant de la monnaie de billon, le tout ayant une valeur assez considérable. Malgré cela, l'ermite, à qui les malfaiteurs avaient dérobé récemment une dizaine de francs, déclarait à ses "donneurs ", non sans amertume, qu'il était sans ressources.

Il résulte des constatations médicales que l'ermite, qui était très faible en raison de son grand âge, a été étouffé pendant son sommeil. L'assassin a dû lui mettre la main sur la bouche pour amener l'asphyxie.

Plusieurs arrestations ont été opérées à la suite de ce crime, notamment celle le 27 juin 1891 de François Claudius Koënigstein, un anarchiste nommé Ravachol, sur equel pèsent les charges les plus graves. La maîtresse de Ravachol, a fait en effet des aveux partiels, et on a trouvé à son domicile, ainsi qu'à celui de son amant, plusieurs milliers de francs en menue monnaie provenant du trésor dérobé à l'ermite. Malheureusement l'assassin présumé réussit à s'échapper des mains des gendarmes qui le conduisaient à Saint-Etienne.

S'en suivent une poursuite de plusieurs années, parsemées de nombreux attentats, vols...


Arrestation et procès


Le 30 mars 1892, Ravachol est interpellé dans un restaurant, avec difficulté par le commissaire Dresch et une dizaine d'agents de police.

Un premier procès s'ouvrent alors, à la cour d'assises de la Seine, pour les attentats, pour lequel il sera condamné aux travaux forcés à perpétuité.

Un second procès se déroule le 21 juin, à Montbrison, devant la Cour d'assises de la Loire. Ravachol est accusé de plusieurs crimes et délits antérieurs aux attentats. Il reconnaît la violation de la sépulture et l'assassinat de l'ermite de Chambles, mais nie énergiquement être responsable des meurtres de La Varizelle et de Saint-Étienne.

Pour sa défense, Ravachol déclare qu'il a tué pour satisfaire ses besoins personnels et soutenir la cause anarchiste. Le président réfute cette thèse. Pour lui, Ravachol a tué pour vivre du crime, et « mener une vie tranquille, sans rien faire ». Sa cause est désespérée, seuls son frère et sa sœur le soutiennent en témoignant de son rôle de père pendant leur enfance.

Ravachol est condamné à mort. Il accueille le verdict au cri de « Vive l'anarchie ! » Le président des assises lui refuse le droit de lire une dernière déclaration qu'il remet à son avocat, maître Lagasse.
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 L'exécution


Ravachol est exécuté le 11 juillet 1892, à Montbrison, par le bourreau Louis Deibler. Il refuse l'assistance de l'aumônier et chante Le père Duchêsne en allant vers la guillotine. Ses dernières paroles sont « Vive la ré... » au moment où le couperet tombe. Le télégramme partiellement chiffré de l'annonce de l'exécution le traduit par « Vive la république ! » Il semble plus juste de penser avec Jean Maitron que ses dernières paroles furent « Vive la révolution ! » ou « Vive la révolution sociale ! » comme le firent de nombreux anarchistes avant et après lui.